En allant voir Polisse, je me disais dans le bus qu’il fallait que je me prépare à morfler pendant deux heures, à ressortir légèrement traumatisée et à ne pas bien dormir la nuit qui suivrait (oui, je suis du genre impressionnable). Eh bien il n’en fut rien ! Je ne dis pas non plus que c’était comme aller voir une symphonie de Disney…Mais enfin je n’aurais pas cru pouvoir être aussi détendue en visionnant un film sur la pédophilie.
Je crois que là réside toute la force du film : en traitant d’un sujet terriblement effrayant, Maïwenn parvient à ne pas accabler le spectateur et à ne pas faire de misérabilisme. Le trait n’est pas forcé et il n’y a que comme cela que cela peut fonctionner.
Les personnages qui nous intéressent ici ne sont pas les enfants et adultes qui traversent un drame et les bureaux de la brigade des mineurs, mais bien les policiers qui composent cette même brigade. C’est précisément cela qui permet au spectateur de supporter deux heures de film sur la pédophilie.
En effet, le fait que le fil rouge soit les policiers donne l’occasion à la réalisatrice d’offrir des moments de respiration et même de fou rire au spectateur. L’équilibre est, selon moi très réussi et tout fait cohérent. Le film n’en est que plus juste.
Le prétexte du film est de suivre l’arrivée au sein de la brigade, du personnage joué par Maïwenn : une photographe désireuse de faire un reportage sur la brigade. Malheureusement, et c’est là la plus grosse faiblesse du film, le personnage en question est assez inintéressant et n’apporte rien à l’histoire. On se moque de l’histoire de cette petite bourgeoise qui vient s’encanailler à Belleville (ouh ! Belleville !), on se moque de la relation qu’elle noue avec un des flics. Le procédé scénaristique est clair, on le comprend tout à fait : Maïwenn a elle-même été ce personnage intrus lorsqu’elle a suivi une équipe de brigade des mineurs en préparation du film et c’est une façon pour elle de prendre le spectateur par la main pour lui « présenter » la brigade. De plus, elle évoque au passage le fait (sûrement réel) que les policiers ont la crainte constante que cette photographe ne soit là que pour faire du scandaleux, du racoleur. Il demeure cependant que ce personnage manque cruellement d’intérêt.
En dehors de cela, le film fonctionne – à mon avis – très bien.
On découvre au fur et à mesure des interrogatoires et des missions de terrain menés par la brigade ce qu’implique leur travail au quotidien pour ces flics. Que ce soit au niveau professionnel ou personnel.
On peut voir qu’au sein de la police, la brigade n’est pas prise au sérieux et qu’ils ont des difficultés à faire leur travail correctement compte-tenu du peu de moyens qui leurs sont octroyés (mais n’est-ce pas le lot de tous les domaines du public ?).
La réalisatrice nous montre aussi comment les relations professionnelles ne peuvent rester simplement de l’ordre du professionnel étant donné le vécu en commun, un quotidien très lourd et chargé en émotions fortes.
Au fur et à mesure du film, la vraie question qui a surgit dans mon esprit était : mais COMMENT ces gens font-ils pour avoir une vie normale ? Notamment une vie familiale et ce, sans surprotéger leurs enfants ? C’est très clair dans le film – et c’est d’ailleurs de notoriété publique -, la pédophilie peut être trouvée dans tous les milieux, pratiquée par n’importe quelle personne et dans n’importe quel contexte.
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Alors, comment arrive-t-on à confier son enfant à qui que ce soit d’autre, quand on est le témoin privilégié et quotidien de toutes les horreurs qu’un adulte est capable de faire subir à plus faible que soi ?
Comment arrive-t-on à conserver un rapport sain à sa propre progéniture ?
Sans parler du système odieux qui permet à certaines personnes (coupables) de s’en tirer sous prétexte qu’elles « connaissent des gens » (sic).
Dans le film, le mensonge des parents est brièvement évoqué (accuser son ex-conjoint de pédophilie pour pouvoir avoir la garde l’enfant, c’est tellement pratique !). En revanche, le mensonge des enfants en est totalement absent, c’est pourtant assez central dans ce genre d’enquêtes et, j’imagine, une des choses les plus compliquées à gérer. Sujet peut-être trop délicat ou tout simplement que Maïwenn ne voulait pas traiter.
On apprécie aussi le fait que ces flics sont loin d’être parfaits. Parfois à la limite de la beaufitude et de l’homophobie et créant un climat d’extrême violence au sein de l’équipe – violent en tout genre : verbale, physique ou auto-infligée. Ils sont peut-être sensibles à leur domaine (Joey Starr nous fait le flic violent au grand coeur), mais dès qu’on sort de leur métier…sont-ils les personnes les plus fines au monde ? (rhétorique quand tu nous tiens)
Pour ne citer que deux scènes représentatives des possibilités émotionnelles offertes par le film, j’évoquerais cette scène terrible, à la limite du supportable où le petit Oussmann, séparé de sa maman, hurle pendant quelques secondes qui paraissent une éternité. Silence de mort dans la salle du cinéma et ce n’est que lorsque le petit se calme à l’écran que je me rends compte que les larmes roulaient le long de mes joues, sans même que je m’en aperçoive. Et ma voisine de siège de se moucher.
La deuxième scène que je citerais est terriblement drôle. Lors d’un craquage nerveux de l’équipe, on parvient à un terrible « Et pour un ordi tu fais quoi ? » qui finit de nous achever. Je n’en dirais pas plus, d’abord parce que hors contexte, c’est tout sauf drôle. Et aussi pour ne pas vous gâcher la scène si vous n’avez pas encore vu le film (mais qu’est-ce que vous fabriquez ??) (sauf les parents de jeunes enfants, je ne vous le conseille pas).
En tout cas, on peut reconnaître à Maïwenn son talent pour choisir les acteurs et pour les diriger : ils sont tous excellents, enfants y compris. Et ce n’est pas donné à tout le monde de pouvoir traiter d’un sujet pareil en donnant au spectateur autre chose comme impression en sortant de la salle que d’avoir été passée dans une moulinette émotionnelle, chapeau !
Et aussi, un autre talent à ajouter à son carcan : elle réussit à rendre Joey Starr sexy. Et pour que MOI, je réussisse à trouver Joey Starr sexy…il faut le faire.
Un film de : Maïwenn
Pays d’origine: France
Avec : Karin Viard, Joey Starr, Marina Foïs, Maïwenn
Durée : 2h 07min
Date de sortie France : 19 octobre 2011
Vu en :VF (VO)
8 décembre 2011
Jusqu’à présent, je n’étais pas sûre d’avoir envie de le voir, mais si Joey Starr est devenu sexy…
A part ça, cette critique faite par une non-professionnelle de la profession donne peut-être un avis plus proche de ce que peut ressentir le spectateur lambda devant ce film qui, visiblement, ne joue ni sur le pathos ni sur le voyeurisme latent en chacun de nous.
8 décembre 2011
Hahaha, j’avais oublié, c’est exactement ça 😀
8 décembre 2011
Merci de souligner l’inutilité du personnage de Maïwen. J’ajoute que le moment où JS lui fait détacher ses cheveux et enlever ses lunettes (pour révéler sa beauté wahou) est digne d’un film avec Freddie Prinze Jr ! Il manquait juste la musique « Kiss me », si tu vois à quel film je fais référence…